L’adoption définitive de la Loi n°2020-1576 du 14 décembre 2020 de Financement de la Sécurité Sociale pour 2021, ayant pour principal effet d’allonger le droit à congé paternité, constituerait une des « avancées sociales majeures » du XXIème siècle.
Le 8 mars 2018, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, l’exécutif rappelait que l’égalité entre les femmes et les hommes était une grande cause nationale.
Ainsi, le Gouvernement publiait un rapport, le 11 septembre 2018, dont l’objectif était de renforcer le congé parental en mettant en avant la nécessité d’allonger la durée de ce droit à congé.
Le 8 septembre 2020, un rapport d’une commission d’experts pour les 1.000 premiers jours de l’enfant était remis par le neuropsychiatre Boris CYRULNIK.
Les objectifs étaient donc clairs, d’une part, promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes en favorisant le partage des tâches dès les premiers jours de l’enfant et, d’autre part, permettre aux deux parents de profiter davantage de leur enfant après sa naissance, permettant au nouveau-né de se développer dans les meilleures conditions.
Etant précisé que, selon un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales de 2018, sept pères français sur dix en moyenne prenaient leur congé paternité.
Après avoir été laissé dans un état végétatif pendant plus de deux ans, ce projet a finalement vu le jour grâce à l’adoption définitive de la Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2021.
QUID JURIS ? Réelle avancée ou effet de mode ?
A titre liminaire, il convient de rappeler que, sous réserve qu’un acte de naissance soit remis à l’employeur, le salarié qui travaille en France peut bénéficier de deux types de congés.
En effet, un congé de trois jours ouvrables est accordé au salarié pour chaque naissance survenue à son foyer ou pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption. On parle de congé de naissance ou d’adoption.
Attention ! Ce congé peut être d’une durée plus importante si la convention collective applicable à votre entreprise, ou à défaut un accord de branche, le prévoit(1).
Et si depuis plus d’un siècle le congé maternité a vu le jour(2), c’est seulement le 1er janvier 2002 qu’était instauré un véritable dispositif dédié aux pères.
Ainsi, le père reconnu par l’état civil pouvait prétendre à un congé dit de paternité et d’accueil de l’enfant d’une durée de 11 jours calendaires lors de la naissance d’un enfant(3), contre 6 semaines minimum après l’accouchement pour la mère de l’enfant(4).
Ce congé ne pouvait être fractionné et devait être pris dans les 4 premiers mois de l’arrivée de l’enfant.
Progressivement, ce droit à congé a été ouvert au conjoint salarié de la mère ou à la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement avec elle.
Depuis le 1er juillet 2019, ce congé est de droit en cas d’hospitalisation immédiate de l’enfant après sa naissance, dans une unité de soins spécialisée.
Un décret(5) précise toutefois que, dans ce dernier cas, la durée maximale de ce congé est de trente jours consécutifs.
A compter du 1er juillet 2021, ce congé est ouvert aux pères pour une durée maximale de 25 jours calendaires.
Un récent décret(6) précise les modalités de prise du congé paternité, notamment :
- le champ d’application de prise dudit congé ;
- les possibilités de fractionnement de prise du congé ;
- le délai de prévenance de l’employeur.
A retenir ! Le congé paternité est désormais de 25 jours calendaires pour les pères dont l’enfant est né à compter du 1er juillet 2021 ou, né avant cette date, dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date, et dont 4 jours calendaires doivent obligatoirement être pris consécutivement au congé de naissance.
Ces jours peuvent être fractionnés en deux périodes d’une durée minimale de 5 jours chacune.
En sus, le congé paternité doit être pris dans les 6 mois suivants la naissance de l’enfant.
Enfin, le salarié, en droit de bénéficier de ce congé, informe son employeur de la date prévisionnelle de l’accouchement, des dates de prise et des durées de congé au moins un mois avant celle-ci.
Dans le même temps, il est mis un terme au vide juridique qui persistait en cas de coparentalité ou d’homosexualité.
Au titre de l'interdiction des discriminations, ce congé est attribué, non seulement au père biologique, mais également, au conjoint salarié, marié ou pacsé, du même sexe(7).
Attention ! Tous les salariés du privé, de la fonction publique, les travailleurs indépendants et les non-salariés agricoles sont concernés.
Cette loi est ainsi un moyen de veiller à ce que les salariés éligibles au congé paternité puissent réellement exercer leur droit, mais aussi de réduire les inégalités.
Bien que cette dernière réponde aux fortes demandes sociétales, ce système demeure encore trop lacunaire au regard de ce qui se fait chez nos voisins européens.
Au nord, les pères suédois bénéficient de 2 mois de congé, augmentés de 11 mois à se répartir avec la mère, payés à hauteur de 80% du salaire, là où en Norvège(8), les pères bénéficient d’un quota de 26 semaines à partager avec la mère, payé à 100% du salaire.
Au sud, depuis le 1er janvier 2021, les pères espagnols disposent d’autant de semaines que les mères, soit 16 semaines.
Quant au Portugal, les pères et mères disposent d’un droit à 150 jours, payés 100% du salaire, si le père prend au moins 30 jours seul avec son enfant, contre 120 jours si ce critère n'est pas suivi.
Notes :
(1) Article L.3142-4 du Code du travail
(2) 1909
(3) Article L.1225-35 du Code du travail
(4) Article L.1225-29 du Code du travail
(5) Article 5 du décret n°2019-630 du 24 juin 2019
(6) Décret n°2021-574 du 10 mai 2021, publié au JO le 12 mai 2021
(7) Défenseur des droits, décision n°2020-036 du 9 octobre 2020
(8) où le congé parental existe depuis 1977
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