Par un arrêt en date du 06 mai 2021, publié au bulletin, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation rappelle que la perte de gains professionnels est un préjudice distinct du préjudice d’incidence professionnelle, ce dernier résultant de la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail. (Civ.2ème, 6 mai 2021, n°19-23.173)
La décision du 06 mai 2021 s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence admettant le cumul de ces deux postes de préjudice (Civ. 2e, 14 sept. 2017, n° 16-23.578 ; Civ. 2ème,23 mai 2019, n° 18-17.560, Crim. 28 mai 2019, n° 18-81.035)
Dans cette espèce, un homme avait été victime d’un accident alors qu’il était passager d’un train.
Indemnisation de la perte de salaire à la date la plus proche de l’accident
Dans son pourvoi, la victime reprochait à la Cour d’appel, sur le fondement de l’article 455 du Code de procédure civile, de s’être abstenue d’examiner la demande d’évaluation du salaire mensuel en refusant d’intégrer dans les calculs, ses derniers bulletins de salaire, de sorte que, il ne pouvait être procédé à une juste évaluation du salaire mensuel moyen perçu antérieurement à l’accident.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel en rappelant que l’indemnisation de la perte de salaire actuelle doit être évaluée à la date la plus proche de l’accident.
Indemnisation du préjudice lié à l’incidence professionnelle
La Cour d’appel de Limoges, par un arrêt du 26 septembre 2019, avait exclu tout préjudice lié à l’incidence professionnelle en énonçant que la victime ne justifiait pas « au titre d’un préjudice de carrière, de la perte de chance de progression professionnelle et donc de l’existence d’un préjudice distinct de celui déjà indemnisé au titre de la perte de gains professionnels, depuis la date de l’accident jusqu’à la fin de vie. »
Sous le visa du principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, la Cour de cassation considère que la cour d’appel a privé sa décision de base légale en ne recherchant pas « si n’était pas caractérisée l’existence d’un préjudice résultant de la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail, indemnisable au titre de l’incidence professionnelle ».
Autrement dit, l’incidence professionnelle qui vise à réparer les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle intègre le préjudice résultant de la dévalorisation sociale.
Sur ce point, la jurisprudence a considéré que la victime, dont le retour à l’emploi est très aléatoire, perd une chance d’une promotion professionnelle indemnisée au titre de l’incidence professionnelle qui se distingue du préjudice réparé au titre de la perte de gains professionnels futurs (Civ.2ème, 23 mai 2019, n°18-17.560).
De plus, si une victime a subi une perte de gains jusqu'à l'âge auquel elle aurait pris sa retraite, elle a nécessairement subi une diminution de ses droits à la retraite (Cass. 2e civ., 20 oct. 2016, n° 15-15.811).
Ce préjudice est indemnisé sur la base d'une perte de chance de percevoir une retraite à taux plein si la victime avait pu prendre sa retraite à l'âge normal de départ à la retraite (Cass. crim., 4 déc. 1996, n° 96-81.163, n° 5326 P + F Cass. 2e civ., 11 sept. 2014, n° 13-10.414).
Viole le principe de la réparation intégrale du préjudice la cour d'appel qui n'indemnise la perte des droits à la retraite, inhérente à la réduction de l'activité professionnelle, ni au titre de la perte de gains professionnels futurs, capitalisée sur la base d'un euro de rente temporaire jusqu'à 65 ans, ni au titre d'un autre poste de préjudice (Cass. 1re civ., 7 oct. 2020, n° 19-18.086).
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