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INDEMNISATION DU PREJUDICE MORAL DE LA VICTIME PAR RICOCHET : INDEPENDANCE DE LA GRAVITE DU HANDICAP DE LA VICTIME PAR RICOCHET

Photo du rédacteur: Valentine FORREValentine FORRE

Par un arrêt en date du 14 novembre 2019, la première chambre civile de la Cour de cassation précise que le préjudice moral ou d’affection ouvre droit à réparation dès lors qu’il est caractérisé, quelle que soit la gravité du handicap de la victime directe. (Civ.1ère 14 novembre 2019, n°18-10.794)


Dans cette espèce, une épouse avait assigné un laboratoire producteur de Distilbène en invoquant son exposition in utero au diéthylstilbestrol (DES). Cette exposition avait été établie.


La victime présentait, en raison de l’exposition au DES, des troubles de la fertilité et des risques de cancers impliquant une angoisse liée à la nécessité de se soumettre à un contrôle médical plus strict.


Son époux était intervenu volontairement à l’instance en demandant l’indemnisation de son préjudice moral consécutif à la souffrance et au désespoir de son épouse durant les seize années de tentatives de procréation.


Pour rejeter sa demande d’indemnisation, la Cour d’appel de Versailles dans un arrêt en date du 23 novembre 2017 retenait que « le préjudice moral des proches à la vue de la souffrance de la victime directe est réservé aux hypothèses dans lesquelles ils sont soumis au spectacle de la survie diminuée et gravement handicapée de la victime directe, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ».


Or, ce poste de préjudice est défini par le rapport Dintilhac comme le préjudice moral subi par certains proches à la vue de la douleur de la déchéance et de la souffrance de la victime directe.


Autrement dit, n’est pas seulement indemnisé le préjudice de la perte d’un proche mais l’indemnisation du préjudice moral est également ouverte en cas de survie de la victime directe.


En pratique, l’indemnisation du préjudice d’affection est quasi-automatique pour les ascendants ou descendants de 1er degré, en ligne directe, notamment le père et la mère.


Toutefois, l’indifférence de lien de parenté n’exclut pas l’indemnisation de ce préjudice lorsque la victime directe et la victime par ricochet ont un lien affectif proche.


Selon une jurisprudence constante, la seule preuve exigible est celle d’un préjudice personnel, direct et certain (Civ.2ème 1er juillet 2010, n°09-15.907).


Ainsi, dans un arrêt en date du 04 juillet 2013, la Cour de cassation a cassé un arrêt de Cour d’appel qui déboutait la victime par ricochet de sa demande de réparation de son préjudice d’affection au motif qu’elle ne vivait plus au sein de la famille et qu’elle n’établissait pas de lien d’affection particulier avec son frère ni de partage permanent d’activités de loisirs avec lui (Civ.2ème, 4 juillet 2013, n°12-24.164).


C’est au regard de ces éléments et sous le visa du principe de réparation intégrale sans perte ni profit de la victime que la Cour de cassation a, dans notre espèce, cassé l’arrêt de la Cour d’appel en considérant « qu'un préjudice moral ou d'affection ouvre droit à réparation dès lors qu'il est caractérisé, quelle que soit la gravité du handicap de la victime directe ».


A retenir ! L’indemnisation du préjudice moral ou d’affection d’une victime par ricochet est indépendante de la gravité du handicap de la victime directe dès lors qu’un handicap est établi. 


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