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Photo du rédacteurMaurine STERZ--HALLOO

DROIT A LA PREUVE ET VIDEOSURVEILLANCE ILLICITE

Un nouvel arrêt de la Cour de cassation met en balance le droit à la preuve avec un moyen de preuve obtenu ou produit de manière illicite (Cass. Soc. 14 février 2024 n°22-23.073).

 

Le recours à la vidéosurveillance par l’employeur est strictement encadré.

 

Conformément à l’article L.1222-4 du Code du travail, les salariés doivent être informés préalablement à la mise en place d’un dispositif de contrôle de leur activité, même si ceux-ci ne peuvent sérieusement pas ignorer l’existence de caméras vidéo.

 

Lorsqu’il existe, le Comité social et économique doit être informé et consulté sur les moyens et les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise.

 

De plus, le recours à la vidéosurveillance doit répondre à un objectif légitime et ne pas porter une atteinte excessive aux libertés des salariés par une surveillance constante.

 

Autrement dit, l’installation d’un système de vidéosurveillance doit toujours être justifié par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée aux buts recherchés.

 

Pour la CNIL, l’employeur peut installer des caméras notamment au niveau des entrées et sorties des bâtiments, des issues de secours, des voies de circulation, dans les zones où sont entreposées des marchandises. En revanche, elles ne doivent pas filmer les employés sur leur poste de travail (sauf circonstances particulières), ni les zones de pause ou de repose des salariés, les toilettes et les locaux syndicaux.

 

Dans le cas d’espèce, ces conditions n’étaient pas respectées par l’employeur.

 

En effet, la mise en place de la vidéosurveillance n’avait fait l’objet ni d’une information préalable des salariés ni d’une consultation du CSE.

 

Saisie une première fois dans cette affaire en 2021, la Cour de cassation retenait que ce mode de preuve était illicite et qu’il appartenait donc à la Cour d’appel de statuer sur sa recevabilité (Cass. Soc. 10 novembre 2021 n°20-12.263).

 

Se prononçant sur renvoi après cassation, la Cour de cassation reprend sa propre jurisprudence et celle de l’Assemblée plénière dans deux attendus :

 

« 5. Il résulte de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 9 du code de procédure civile que, dans un procès civil, l'illicéité dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

6. En présence d'une preuve illicite, le juge doit d'abord s'interroger sur la légitimité du contrôle opéré par l'employeur et vérifier s'il existait des raisons concrètes qui justifiaient le recours à la surveillance et l'ampleur de celle-ci. Il doit ensuite rechercher si l'employeur ne pouvait pas atteindre un résultat identique en utilisant d'autres moyens plus respectueux de la vie personnelle du salarié. Enfin le juge doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte ainsi portée à la vie personnelle au regard du but poursuivi. ».

 

Après avoir mis en balance le droit de la salariée au respect de sa vie privée et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l’entreprise, les juges ont considéré que « la production des données personnelles issues du système de vidéosurveillance était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et proportionnée au but poursuivi » dans la mesure où le but légitime poursuivi par l’entreprise était le droit de veiller à la protection de ses biens et que le visionnage des enregistrements avait été, d’une part, effectué dans un contexte d’anomalies dans les stocks et, d’autre part, limité dans le temps.

 

Pour en savoir davantage sur vos droits et obligations, contactez notre Cabinet.

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